Un tremplin pour l’Utopie

Issus d’un concours de nouvelles lancé par les Indes de l’Imaginaire, le recueil Un tremplin pour l’Utopie fait partie d’une promotion « deux hélios achetés, le recueil offert ». Proposant huit nouvelles, dont six sont le fait d’auteurs jamais publiés auparavant, le recueil est de très bonne facture et les nouvelles sont agréables à lire.
 
Oscillant entre uchronie, futurs technologiques (sur Terre ou ailleurs) ou expérience historique, les huit nouvelles furent une très bonne surprise. Le seul bémol, mais que j’avais déjà au lancement du concours de nouvelle, est la difficulté de proposer une Utopie qui ne louche pas fortement sur la Dystopie, je suis néanmoins surpris de voir que certains auteurs ont su relevé le défis.
 
Le sommaire :
  • « Les anges tièdes » d’Estelle Faye
  • « Destinée d’une nation » de A.D.B.
  • « Les premiers jours de mai » de David Chambost
  • « Anémocratie » de Vincent Gaufreteau
  • « Le jour où Dieu m’a vue nue » d’Ariel Holzl
  • « Murmures lointains » d’Aurélia Léon
  • « Le moins pire des mondes » de Bruno Pochesci
  • « Nulle part, tout le temps » de Christian Chavassieux

Vostok

Dernier roman en date de Laurent Kloetzer, Vostok débute comme un roman d’anticipation se passant à Valparaiso au Chili.
 
Suivant Leo, la sœur d’un chef de gang travaillant pour le Cartel (un groupe mafieux en guerre contre les Andins et leurs technologies avancées), Vostok commence par poser les différents personnages et le contexte avant de faire un saut de quelques années et de lancer pleinement son intrigue. Celle-ci est très maligne : un serveur sécurisé, un mot de passe à la fois complexe et simple qui nécessite de se rendre littéralement au bout du monde pour le découvrir : à Vostok, une ancienne base de recherche soviétique se trouvant en Antarctique, et où un des plus profond forage de glace au monde permet d’atteindre un lac souterrain vierge de tous contact avec le reste du globe depuis des millénaires.
 
Débute alors une mission éprouvante dans des conditions extrêmes (météorologiques et psychologiques). Evidement la mission, une fois à Vostok, va partir en sucette et les différents protagonistes vont devoir faire face aux secrets des uns et des autres, à la solitude et au froid dans un huis clos bien construit et jamais totalement étouffant.
 
Vostok est très très bien écrit et maitrisé avec une intrigue maligne et bien ficelée. Hélas l’utilisation d’un éléments quasi fantastique, le Ghost (une créature fantomatique qui accompagne deux des personnages) et dont la présence/existence  jamais expliquée permet, à plusieurs reprises, à l’intrigue de progresser sous la forme de « Deus Ex Machina » bien pratique m’ont régulièrement extrait de ma lecture. Cela est bien dommage car, je le redis, le roman est de grande qualité.

The Long Cosmos

En chroniquant le tome 4 de la série de la Longue Terre, La longue Utopie, je regrettais que le tome 5 prévu dès le départ ne voit jamais le jour suite à la disparition de Terry Pratchet. Ce fut donc avec surprise, et contentement, que je découvris, il y a quelques mois, la sortie du tome cinq, et dernier de la série : The Long Cosmos.
 
Ecrit en grande partie à quatre mains, terminé par Baxter en utilisant le plan prévu pour la série, The Long Cosmos conclut la série tel que prévue par ses auteurs. Se déroulant soixante ans après le premier tome et mettant en scène les personnages survivants déjà apparu dans les autres tomes, dont Joshua Valiente maintenant dans la soixantaine, The Long Cosmos débute avec une invitation venue des étoiles. Résonant à travers toutes les longues Terres, perçue par les créatures capables naturellement de passer d’une Terre à l’autre, mais également captée par les radios télescopes scrutant l’espace profond,  l’invitation peut se résumer en une courte phrase : « Rejoignez nous ».
 
Débute alors un projet fous, fruit de la collaboration entre les nexts (des humains super intelligents apparu avec l’expansion de l’humanité sur la Longue Terre) et les humains normaux, pour tenter de répondre à cette invitation.
 
Le lecteur suit bien évidement divers personnage dans l’avancée du projet, mais également Joshua Valiente qui, suite à un accident, se retrouve à partager la vie d’une tribu de Trolls et en apparent plus sur ces créatures et sur la Longue Terre.
 
Concluant de fort belle manière la série, The Long Cosmos propose toujours une construction de monde et une histoire de l’humanité brillante, des personnages bien construits, une écriture agréable à lire, mais propose aussi une intrigue plus structurée que dans les autres tomes. Définitivement une grande série pour moi.

Phare 23

Un soldat décoré lors d’une bataille comme il y a beaucoup dans la guerre entre les humains et une race extraterrestre se retrouve gardien du « Phare » 23 (en fait une balise qui permet aux vaisseaux de déplaçant plus vite que la lumière d’éviter une zone dangereuse).
Le roman explore la vie quotidienne de ce gardien de phare dont l’esprit vacille peu à peu face à la solitude, au stress de son ancienne vie de soldat et à l’imposture que représente sa décoration. Phare 23 est constitué de plusieurs épisodes se déroulant dans le « phare » : accident, visite de chasseur de prime, sortie dans l’espace, arrivée d’un nouveau phare à proximité, etc. Le tout formant une trame qui finit par raconter une histoire plus vaste et aux conséquences touchant à la grande guerre que livre l’humanité contre des extraterrestres.
Phare 23 n’est sans doute pas le meilleur roman de l’année, mais il reste bien écrit et divertissant.

La Confrérie des bossus

Réunissant un ensemble de textes, retravaillés pour l’occasion, qui étaient parus dans les différents suppléments de jeu de rôle Agone, La Confrérie des bossus est un court roman sombre se déroulant dans l’Harmonde de Agone et Abyme. Publié sur un papier épais et une joli édition, le roman intéressera avant tous ceux qui ont déjà lu les autres ouvrages se déroulant dans cet univers crépusculaire.
Le roman raconte la tentative d’une poignée d’initiés de créer un sanctuaire regroupant les flammes (l’Âme incarnée) de plusieurs villes. Le projet, qui ne se déroulera pas comme prévu, permet aux lecteurs de retrouver Agone de Rocheronde, dont le destin après les romans est révélé, et Maspalio.
La Confrérie des bossus est un court roman qui m’a très agréablement surpris et que j’ai pris grand plaisir à lire.

Le Marteau de Thor

Faisant suite au Château des millions d’années, Le Marteau de Thor débute là où le tome précédent se termine.
 
Alternant toujours les points de vue de narration, avec entre les chapitres des sauts temporelles éclairant le passé des différents personnages et donnant un avant goût, parfois, de la direction futur prise par l’histoire, Le Marteau de Thor se centre avant tous sur une mission secrète allemande en territoire britannique, en 1939, afin de récupérer une mystérieuse arme trouvée en Irak pour l’agent allemand Friedrich Saxhäuser, qui passe ici au second plan.
 
Difficile d’en dire d’avantage, j’en ai même déjà peut-être trop dit, sans déflorer l’intrigue. Je me contenterai de mettre donc en avant ce qui me semble être les qualités et les défauts du roman. Au niveau défaut, le sentiment que la trame de fond (une présence extraterrestre sur Terre) n’avance que peu et que les deux premiers tomes ne sont en fait qu’un préambule à quelques choses de plus vaste qui arrive par la suite (histoire secrète ou uchronie, pour l’instant les deux romans sont dans le camp du premier, mais difficile à dire par la suite). Au niveau qualité : une écriture très maitrisée, des personnages complets et complexes dont le passé éclaire les actions actuelles, comme dans le premier tome tous les protagonistes sont profondément humains, même les salauds ont des qualités humaines.
 
A noter que les deux premiers tomes, et j’espère bientôt le troisième qui vient de sortir, existe en format audio. La lecture, ou plutôt l’écoute, du Marteau de Thor fut très agréable malgré un lecteur un peu mécanique par moment. La suite maintenant !

La Terre bleue de nos souvenirs

Premier tome d’une trilogie proposant une histoire de notre futur, La Terre bleue de nos souvenirs d’Alastair Reynolds est également une lecture « de rattrapage » pour le prix Planète SF dont je suis juré.
Se déroulant en 2160 sur une planète divisée entre l’Union de états terrestre et l’union des états aquatiques, où l’humanité s’est développée en direction du système solaire (la Lune, Mars et certaines de ses lunes, ainsi que des astéroïdes sont colonisés), où les innovations technologiques ont drastiquement allongé l’espérance de vie, développé l’accès direct à la réalité augmentée grâce à des implants et où la surveillance par une IA a fait quasiment disparaitre la criminalité et la violence,  le roman suit un frère et une sœur, membre de la famille Akinya, famille qui contrôle une puissante et riche corporation d’origine africaine.
Le roman débute alors que la matriarche de la famille, exilée depuis 60 ans dans une station orbitant autour de la Terre et ancienne aventurière de l’espace à l’origine de la puissance familiale, décède. Geoffrey Akinya, biologiste s’occupant d’éléphants et peu impliquer dans les affaires familiales, se voit chargé par ses cousins de se rendre sur la Lune afin de récupérer le contenu d’un coffre ayant appartenu à sa grand-mère. C’est l’occasion pour lui de s’assurer l’obtention de fonds pour ses recherches et de pouvoir voir sa sœur Sunday vivant sur le côté obscure de la Lune dans une zone anarchique et libertaire.
Le contenu, d’apparence anodin, du coffre lancera le frère et la sœur sur un jeu de piste qui vont les mener dans tous le système solaire et au cœur des tensions régnantes entre les différentes puissances du monde de 2160. Le tout afin de découvrir qu’elle est le dernier héritage laissé par leur grand-mère.
Le roman est donc un jeu de piste et de péripéties qui fait découvrir au lecteur à la fois la manière dont le monde de 2160 s’organise mais également les différentes philosophies et technologies qui le traversent.
La Terre bleue de nos souvenirs est un roman très agréable à lire qui propose une vision plutôt optimiste de notre avenir. Comme histoire du futur, ce premier tome est une vrai réussite. Les seuls bémols que j’émettrai concerne une histoire peut-être un peu alambiquée et prétexte au voyage pour un résultat final qui n’utilise que peu les découvertes effectuées.

Sous le lierre

Gros roman (488 pages) de Léa Silhol, Sous le lierre est un roman se déroulant au début du XXe siècle dans la région rural du Wiltshire en Angleterre.
 
Suivant la vie de Ivy Winthorpe, la narratrice de l’histoire, le roman retrace comment cette jeune fille (16 ans au moment du roman) de la noblesse du lieu va découvrir son histoire, tombée amoureuse, défié les conventions de son milieux et les traditions ancestrales de sa région afin de changer son destin.
 
Le roman se centre sur la forêt de Savernake, domaine familiale pourtant interdit à la jeune fille et aux villageois vivant à proximité. Ivy ne manque pourtant pas de s’y rendre, en cachette, souvent et de l’explorer en détail. C’est là qu’elle fait la connaissance de l’amour se sa vie qui semble destiné à un bien sombre rituel.
 
Mêlant une touche de fantastique (qui pour ceux qui parcoure la Trame tissée par l’auteure donne un aperçu du destin des puissances moindres des cours féeriques), pas mal de pathos, du féminisme et des traditions rurales (l’ombre du « Green Man » et du « petit peuple » n’est jamais loin). En dépit d’une héroïne auquel il est, je trouve, difficile de s’identifier et peut-être quelques longueurs, Sous le lierre est un très bon roman marqué par les relations entre la banalité du monde des hommes et la cruauté et la magie du monde féerique; il m’a d’ailleurs rappelé à plusieurs reprises certains des textes de l’écrivain Charles De Lint.

Mongrels

Mongrels raconte, à la première personne un chapitre sur deux, et à la troisième pour les autres chapitres qui sont des flashbacks, le fin de l’enfance et l’adolescence d’un jeune américain pauvre, vivant sur les routes avec son oncle et sa tante, et qui a la particularité d’être issu d’une famille de loup-garous.
 
Tout l’intérêt du roman est là, c’est de voir la vie sur les routes, entre pauvreté, petits-boulots, violence et criminalité qui caractérise ces loup-garous qui n’ont rien de désirable. Le narrateur ne peut pas se transformer, encore, c’est donc un point de vu d’enfants et d’ados qui est donnés à lire.
 
Difficile d’en dire plus car il n’y a pas à proprement parler une seule histoire dans Mongrels, mais une collection de moment montrant la vie sur la route et l’entrée dans l’âge adulte d’un enfant balloté par son oncle et sa tante d’un bout à l’autre du pays dans un road-trip qui ressemble à une fuite en avant.
 
Une lecture pas inoubliable mais sympathique quand même, fort bien rendu en livre audio.

La voie des oracles : Aylus

Troisième, et dernier, tome de la série de La voie des Oracles, Aylus est un très bon roman qui termine la série de manière très intéressante en y ajoutant une touche sombre bienvenue.
 
En dire plus sans révéler la conclusion du volume précédent est impossible; donc amis lecteurs si tu ne veux pas en savoir plus arrête ici ta lecture !
 
Le troisième tome revient sur à l’époque de premier tome en présentant les versions alternatives des différents personnage dans la nouvelle réalité créée par Thya. Aylus devenu Empereur a banni la religion chrétienne et redonné une nouvelle vigueur aux cultes antiques. Il dirige l’Empire romain depuis Rome avec une cohorte d’oracles et de devins qui l’aide à prendre les bonnes décisions.
 
C’est une version dystopique de Rome qui est présenté ici, où une personne peut-être arrêtée car les devins ont prédis qu’elle commettra un crime, où les besoins du peuple ne sont pris en compte que si le Futur indique que cela en vaut la peine. Rome est redevenu puissante mais au pris de la misère de la masse.
 
Dans ce contexte les différents personnages de la série sont différents mais toujours au centre de l’intrigue : Thya la jeune est envoyée par l’Oracle brulée (Thya « la vielle ») sur le chemin permettant de rétablir le véritable destin du monde. C’est une conclusion où les Dieux prennent part à la lutte et où de grands conflits de profile à l’horizon qu’Estelle Faye propose.
 
 La série de La voie des Oracles fait partie du haut du panier de la Fantasy française actuel.