Abeni’s Song de P. Djèlí Clark

Abeni’s Song est le premier tome d’une série de Fantasy d’inspiration africaine de P. Djèlí Clark.

Abeni est une jeune fille d’une douzaine d’années lorsque son village est attaqué par les troupes de roi-sorcier et détruit. Les adultes survivants sont capturés et emmenés pour être vendus aux « bateaux-fantômes », les enfants sont ensorcelé par une envoutante mélodie jouée par un homme au masque de bouc…

Abeni ne doit la vie sauve que grâce à la vielle « sorcière » qui protège depuis toujours son village. Débute alors pour elle une vie étrange dans une maison magique aux multiples portes et pièces. Mais dans son cœur, Abeni conserve l’envie de retrouver ses amis et sa famille et de comprendre pourquoi son village a été détruit.

Alors, lorsque la « sorcière » est attaquée par un suppôt du roi-sorcier, Abeni part en quête de sa famille avec pour allier des esprits rencontrés en chemin…

Abeni’s Song propose une histoire de Fantasy assez classique avec une enfant qui grandit dans les épreuves et les amitiés rencontrés en chemin. Mais le texte est bien écrit et l’inspiration africaine donne au tout une teinte un peu différente des habituels Fantasy inspirées des mythes européens.

Slayers: A Buffyverse Story

Cette pièce radiophonique de huit heures raconte une histoire se déroulant dans l’univers de Buffy (une décennie près les séries TV, lorsqu’il y a de multiples tueuses) avec une partie des acteurs de la série original.

Le pitch : la tueuse d’un univers parallèle (Cordelia Chase) vient dans notre univers afin de trouver de l’aide pour lutter contre Drussila qui, avec l’aide de la sorcière Tara corrompue, cherche un moyen magique de protéger les vampires contre la lumière du soleil.

Arrivée dans « notre » monde grâce à la magie de Anya, la tueuse Cordelia retourne dans « son » Sunnydale avec Spike, le démon Clem, la jeune tueuse Indira et Giles. Là, séparé, le groupe tente de sauver la situation alors que les allégeances de Spike semblent devenir fluctuantes.

Slayers: A Buffyverse Story propose à la fois une nouvelle histoire et un nouveau contexte en déplaçant l’histoire dans un univers parallèle (et accessoirement cela permet d’expliquer l’absence de personnages clefs dont les acteurs ne sont pas impliqués dans l’histoire proposée). La pièce m’a plus et est fort sympathique. La fin laisse entrevoir la possibilité d’une suite qui pourrait s’annoncer très interessante.

Protectorats de Ray Nayler

Recueil de quatorze nouvelles, dont la majorité inédites en français, Protectorats de Ray Nayler a été concu pour cette édition française sans équivalent en anglais. De fait, le choix des nouvelles et leurs agencements a été réalisé d’une main de maître par Elle Herzfeld et Dominique Martel ce qui donne une très forte cohérence au recueil et au cheminement de lecture qu’il provoque.

Les nouvelles en elle-même se déroule presque toute (probablement toute mais pour certaines un doute est possible) dans la chronologie uchronique des Protectorats. La découverte, en 1938 par les Américains, d’une soucoupe volante écrasée sur Terre va transformer radicalement le destin de l’humanité avec le développement rapide de nouvelles technologies et l’émergence, à terme, de Protectorats, dont celui d’Istanbul est le cadre de plusieurs nouvelles.

De là, Ray Nayler propose des nouvelles se déroulant proche de notre présent ou dans un futur lointain où l’humanité explore les étoiles (en projetant la conscience des explorateurs dans l’espace qui occupe ensuite un corps envoyé en avance pour eux à destination).

Les différentes nouvelles, qui vont de bonne à magistrale, explorent souvent des questionnements liés à la conscience, la mémoire, l’extension de la durée de vie, ce qui fait l’humain.

Bref, au final, Protectorats est un excellent recueil ; de ceux qui vous font dire « mais pourquoi n’ai-je pas découvert cet auteur avant.

La Mer de la Tranquillité de Emily St. John Mandel

La Mer de la Tranquillité, que j’ai audio-lu en VO, est un roman de voyage dans le temps.

Un homme, né dans une des colonies lunaires, enquête à plusieurs époques sur une anomalie temporelle qui semble, pour un bref moment, se faire rencontrer plusieurs époques. Pour ce faire il se rend, depuis son 2401 natal, à différent point dans le temps afin de rencontrer les différents protagonistes qui sont lié à cette anomalie.

Le roman multiplie ainsi les points de vu entre personnages (le voyageur temporel, un violoniste, une écrivaine, un noble exilé, une jeune femme) et époques (la lune en 2401, la terre du XXIIé  siècle, l’an 2020 et le début du XXé siècle. 

Le tout formant un classique, mais sympathique et bien écrit roman qui explorent les thématiques de boucles temporelles, de la nature de la réalité (hypothèse de la simulation) et des pandémies (thème qui revient plusieurs fois dans le roman). Au final donc, La Mer de la Tranquillité ne renouvelle peut-être pas le thème du voyage dans le temps (comme l’annonce le quatrième de couverture francophone) mais propose une solide variation sur un thème classique.

Le Conte de l’Assassin de Jean-Philippe Jaworski

Second tome, après Le Tournoi des Preux, de la trilogie Le Chevalier aux Épines, Le Conte de l’Assassin place le récit du côté de l’ambassade de Ciudalia auprès du duc de Bromael. Plus précisément, le narrateur du récit est l’assassin Benvenuto (déjà narrateur de Gagner la Guerre) qui est chargé d’accompagner l’ambassade et de se mettre au service de la seconde épouse du duc, fille de son patron le dirigeant de Ciudalia.

L’histoire narrée rejoint, au milieu du récit, la fin du roman Le Tournoi des Preux. Le Conte de l’Assassin permet donc au lecteur de savoir si que ce passe dans le « camp » du duc durant le premier roman. Puis, dans la seconde partie, Benvenuto traverse les anciennes terres de Léomance afin d’éliminer l’ancienne duchesse fraichement délivrée du couvent où elle était prisonnière.

Le roman, toujours écrit avec brio et érudition, pourrait se résumer en deux assassinats ratés, contre toute attente, par un des meilleurs assassins de son époque. C’est aussi une balade, peut-être parfois un peu longuette, et un second acte qui annonce un final tendu et violent.

A Day of Fallen Night de Samantha Shannon

Préquel au Prieuré de l’Oranger, Un Jour de Nuit tombée (titre de la traduction française du livre que j’ai audio lu en VO) se déroule plusieurs centaines d’années avant le Prieuré alors que la puissance du feu (une des deux forces, avec l’eau, du monde) prend le dessus et que des dragons menacent le monde.

Le lecteur est invité à suivre les parcours de plusieurs protagonistes : Tunuva Melin, un soeur du Prieuré de l’Oranger qui garde le monde contre la menace des dragons et qui, à l’aube de ses cinquante ans, va devoir faire fasse à l’arrivée de dragons (ce qui n’était plus arrivé depuis des siècles) et d’une mystérieuse femme qui sait où est son fils disparu depuis vingt ans.

Glorian est l’héritière du reinaume d’Inys. Ayant grandit à l’ombre de sa mère, reine puissante et respectée, elle va devoir faire face à de grands défis alors que le reinaume est sur le point de faire face à une menace inédite.

Wolf est un jeune homme du reinaume d’Inys, orphelin recueilli et élevé par un noble, et donc noble lui aussi, il va devoir faire également face a des défis de taille et devenir, peut-être un pont, entre deux mondes très différents.

Finalement, Dumai a été élevé dans un temple lorsque, à vingt-six ans, elle se découvre fille de l’empereur et héritière d’un trône qui vacille sous les assauts d’une famille noble puissante. Alors qu’une menace de feu s’approche, elle réveille les dragons d’eau et se lance dans une course contre la montre pour sauver son royaume.

Ces quatre fils narratifs, qui parfois se croisent, forment une trame riche dans laquelle se développe une histoire épique d’un chapitre tragique de l’histoire du monde du Prieuré.

J’ai apprécié ce gros roman de Fantasy, même si je lui ai trouvé quelques longueurs et, à la fin de ma lecture, un sentiment de « tous cela pour ça ».

When Women were Dragons de Kelly Barnhill

Les USA, 1950, Alexandra Green, Alex, est fille unique dans un couple où le père est souvent absent et la mère femme au foyer (bien qu’ayant fait des études de mathématique brillante). Sa tante, femme forte et atypique, est une ancienne pilote durant la guerre, est également une présence importante dans sa vie.

Lorsqu’en 1955 une proportion importante de femmes se transforme en dragon, dont sa tante, la vie d’Alex change car sa cousine vient vivre avec elle et devient sa sœur. La mort, quelques années plus tard, de sa mère et le remariage de son père vont la faire grandir vite car ce dernier les exile alors loin du foyer.

When Women were Dragons brosse un portrait sans concessions de la place de la femme dans le monde profondément misogyne des États-Unis des années 50 et 60. Au travers de l’histoire de Alex, racontée à la première personne dans un texte écrit au crépuscule de sa vie, dans un monde mâtiné de magie : les femmes peuvent devenir des dragons.

Au final, le roman utilise peut-être une métaphore très transparente (« la femme est un dragon ») pour parler du coming of age d’une jeune fille qui fait face au monde des hommes. Mais l’autrice le fait avec un certain brio qui fait de cet excelent roman une lecture très agréable .

Les flibustiers de la mer chimique de Marguerite Imbert

Futur plus ou moins proche, la nature s’est rebellée contre l’humanité et la civilisation tel que nous la connaissons aujourd’hui s’est effondré, avec au passage la mort de millions de gens.

Sur les ruines de ce que nous connaissions. les survivants tentent de survivre. En Europe ce sont des clans qui, après s’être combattus, sont unis sous la bannière de la métareine reignant depuis Rome. Dans les océans devenus toxiques, les mythiques flibustiers de la mer chimique règnent en maître. sous les ordre d’un mystérieux consortium, grâce à un sous-marin datant « d’avant ».

C’est dans ce contexte que le lecteur est invité à suivre deux narrations interconnectées : le récit d’Ismaël, naturaliste de Rome, en mission pour la métareine et recueilli, avec quelques compagnons, par les flibustiers, et le récit de de la graffeuse Alba qui contient dans son esprit un vaste savoir et qui est mené à Rome.

Les flibustiers de la mer chimique est un roman d’aventure post-apocalyptique bien écrit et truffé de bon mots et de mélange d’histoire et de culture geek. Le récit est mené jusqu’à sa conclusion et les révélations permettant de le comprendre son donnés.

Mais globalement il m’a laissé un peu froid. Sans doute que mon peu d’attrait pour les récits post-apo y est pour quelque chose, mais je ressors de ma lecture avec le sentiment que l’autrice produit un récit qui par moment se veut être malin mais tombe dans le m’as-tu-vu.

Bref, Les flibustiers de la mer chimique est un bon roman qui n’a pas fonctionné pour moi; cela arrive mais ce n’est pas grave.

Translation State de Ann Leckie

Translation State est le dernier roman en date de Ann Leckie, il se déroule dans le même univers que ses précédents romans et dans la continuité chronologique. Si l’histoire est indépendante et peut sans doute se lire sans connaissances préalables de l’univers, j’ai le sentiment qu’il s’apprécie d’avantage si le lecteur a lu les précédent.

En effet, l’intrigue de Translation State tourne autours d’une des factions les plus mystérieuses de l’univers créé par Leckie : les traducteurs Presgr (qui représente une mystérieuse espèce qui pourrait être une menace pour tous s’il n’y avait un traité qui les modère).

Le roman suit trois personnages dont les destins se croisent. Il y a tous d’abord Enae qui, après avoir servi sa grand-mère toute sa vie, se retrouve, à la mort de cette dernière, propulsé à un poste d’enquêtrice sur une disparition vielle de 200 ans. Contre tout atteinte, elle retrouve un descendant du disparu et lance une procédure inatendue.

Le second est Reet, adopté enfant il vit sur une station spatiale et s’interroge sur ses origines. Lorsqu’Enae le découvre, il apprend qu’il n’est en fait pas biologiquement humain mais un traducteur Presgr. Finalement, il y a Qven, une jeune femme créé et élevé pour devenir traducteur Presgr.

Le récit mène le lecteur au cœur de l’administration gérant le Traité et permet de découvrir une partie des coulisse de celui-ci.

Si le roman ne fera pas forcément sens pour ceux qui n’ont pas lu les autres romans de Leckie, il est un lecture très intéressante pour ceux qui l’ont fait en développant un univers riche et varié.

Babel de R. F. Kuang

Babel: An Arcane History de R. K. Kuang, pirx Nebula du meilleur roman 2022, est un impressionnant roman qui revisite le passé colonial britannique en y ajoutant une touche de fantastique/magie.

En effet, le roman se déroule dans la première moitié du XIXé siècle. Les traducteurs sont des personnes très demandée car en gravant un mot et sa traduction sur plaque d’argent il est possible de plier la réalité (un matériau sera plus résistant, des plantes pousseront mieux, un véhicule sera plus rapide, etc.). Mais encore faut-il trouver la bonne traduction et que le traducteur soit réellement bilingue. Et cela sans même tenir compte que, avec le temps qui passe, les traductions perdent de leur puissance, obligeant à chercher des paires dans des langues de plus en plus « exotique » (du point de vu de Londres).

C’est dans ce contexte que Robin Swift, orphelin du choléra, est amené de Canton à Londres par un sévère tuteur (en réalité son père biologique) qui le prépare à entrer au prestigieux institue de traduction royale d’Oxford, surnommé Babel par tous le campus.

Le lecteur est amené à suivre la vie de Swift, et des quelques autres étudiants de sa volée, découvrant Oxford mais aussi le monde de la traduction et ses enjeux pour l’Empire britannique.

Kuang propose une histoire intéressante qui maintien le lecteur en haleine tout en proposant une réflexion sur le colonialisme en faisant d’un élément intime, la langue, une ressource convoitée.

Babel: An Arcane History est au final un roman très intéressant et agréable à lire, pour une réussite.