Le Pays sans Lune de Simon Jimenez

Second roman de Simon Jimenez, Le Pays sans Lune dépend du domaine de la Fantasy, Récemment sortit en français dans la collection Nouveaux Milénaires, c’est en anglais et en audio que j’ai découvert ce roman.

L’histoire principal narrée dans Le Pays sans Lune est celle de la chute du Trône de la Lune, l’Empereur et les « trois Terreurs », fils de la Lune qui n’est plus dans le ciel mais prisonnière et de l’Empereur. Narrant le parcoure de Jun, petit-fils de l’Empereur qui s’enfuit avec la Lune incarnée, vieillissante et proche de sa fiche, libérée de sa prison et Keema, un guerrier manchot rencontré au début de la fuite, le roman décrit comment la dynastie régnante va être éliminée alors qu’elle tente de retrouver et recapturer la Lune.

Mais dans le même temps cette histoire est jouée sur la scène d’un théâtre hors du temps où sont réunis une audience venue de divers époques. Et c’est l’histoire d’une des membres de l’audience qui est aussi narrée dans les interstices de la chute du Trône de la Lune.

Mais Le Pays sans Lune c’est aussi une narration qui s’adresse au lecteur, identifiée comme l’une des membres du public de la pièce historique jouée; une narration qui fait parler les personnages secondaires, comme des esprits qui ferraient entendre leurs voix pour éclaire l’Histoire de leurs histoires.

Mais c’est aussi un texte emprunt d’un onirisme qui teinte le récit et le monde décrit. Un texte parfaitement maîtrisés où même ce qui semblent ne pas avoir de sens en a, en fait, un.

Un magnifique roman au final que je ne peux que vous conseiller de lire.

Les Embrasés de Stefan Platteau

Les Embrasés est un recueil de trois textes se déroulant dans l’univers du Sentier des Astres et qui peuvent être lus indépendamment du cycle de romans.

Mille et une torches est une nouvelle, parue à la fin 2022 dans le cadre d’une opération de promotion de la lecture en Belgique et disponible en ligne, qui est un prologue au cycle des romans. Elle décrit le début de la guerre civile qui embrase l’Héritage alors que l’Héritier-Roi pense avoir vaincu les Luari et célèbre son triomphe dans leur capital, Narrakhin. C’est une nouvelle qui narre la rébellion d’un peuple derrière sa duchesse qui, en puissante magicienne, à plus du tour dans son sac.

Dévoreur est une novella déjà publiée par le passé qui suit le mage Peyr Romo, au retour de l’une de ses nombreuses pérégrinations, et qui retrouve ses enfants enlevé par un de ses voisins qui est devenu un ogre.

Les eaux de sous le monde est un roman totalement inédit qui se déroule, chronologiquement parlant, après Dévoreur et qui met à nouveau en se le mage Peyr Romo.

L’intrigue se déroule dans la cité de Feddrantier au proie à une crue exceptionnel de l’Angmuir, le grand fleuve sacré de l’héritage. Alors que la ville est sous les flots un couvent est au proie à des apparitions. Peyr Romo accepte d’enquêter pour faire la lumière sur ses apparitions surnaturelles.

Débute alors une enquête avec au centre de l’intrigue la rivalité entre deux communautés religieuses venant en aide aux plus démunis et des secrets venus du passés de chaque communauté.

Comme toujours avec Stefan Platteau la langue est fluide et le récit passionnant. Même pour ceux ayant déjà pu lire Dévoreur et Mille et une torches, l’acquisition du recueil vaut la peine pour l’excellent roman Les eaux de sous le monde qui montre que Platteau n’est pas seulement à l’aise dans les récits se déroulant en pleine nature mais également dans un cadre urbain.

Before, After, Alone de Emma Newman

Dans ce recueil de dix nouvelles, Emma Newman propose de courtes histoires se déroulant dans l’univers de sa série débutée avec Planetfall. Pour résumer : notre monde dans un futur proche (IA, assistants personnesl, mais aussi faillite des états nations remplacés par des méga-corporation) où un message extraterrestre reçu par une personne provoque le départ d’un groupe religieux vers une autre planète alors que les méga-corpo tente de dupliquer la technologie de voyage spatiale utilisée.

Les différentes nouvelles du recueil proposent des fenêtres sur l’univers des romans à différents moment de ces derniers. Certains textes n’ont pas de liens directs alors que d’autres se concentres sur une personnage ou un autre déjà apparus dans les romans. L’autrice prend soin d’indiquer si un spoiler mineur ou majeur se trouve dans le texte et une postface éclaire la place chronologique de chaque nouvelle dans l’ensemble.

Comme souvent avec Emma Newman les situations explorées font la part belle à la psychologie et au ressentit des protagonistes. Le recueil est complété par des réponses de l’autrices à des question de lecteur.

Before, After, Alone est un recueil qui m’a beaucoup plus et je suis ravi de retourner dans l’univers de Planetfall qui a encore beaucoup à offrir. Bien que les textes puissent s’apprécier sans avoir lu les romans, je pense qu’ils gagnent clairement en profondeur si on connait déjà l’univers dans lequel ils se déroulent.

Assassin of Reality de Marina & Sergueï Diatchenko

Marina et Sergueï Diatchenko ont décidé de donner une suite direct à Vita Nostra sous la forme d’un second roman : Assassin of Reality .

A la fin de Vita Nostra , Sasha Samokhina passe son examen et devient un élément du « great speach », un « mot de passe », transcendant sa nature humaine. Au début de Assassin of Reality, elle et ses camarades sont ramenés à une forme humaine afin de continuer leurs études. Du temps a passé (le roman se déroule « de nos jours »), mais les cours sont proches à la différence que les étudiants ont maintenant conscience d’être « autre ».

Sasha représente un danger pour le « great speach » car elle peut en modifier jusqu’à la structure et redéfinir complétement la réalité. Certains de ses professeurs veulent donc qu’elle échoue et que son existence même soit remis en cause.

Assassin of Reality n’est pas un mauvais roman, je l’ai lu avec plaisir. Il reprend les thématiques de Vita Nostra en jouant sur le motif des variations. Mais la vérité c’est qu’il est aussi parfaitement dispensable et n’apporte rien de plus à un premier tome exceptionnel qui se tenait très bien (voir mieux) sans une suite.

The Cartographers de Peng Shepherd

Nell Young est issue d’une famille de cartographes; sa défunte mère était cartographe, son père est un chercheur reconnu et influent qui est le chef de la division cartographie de la prestigieuse bibliothèque publique de New York, Nell est aussi cartographe.

Seulement, il y a une petite décennie, elle a trouvé une boite avec plusieurs cartes dans la réserve de la bibliothèque. Croyant à une grande découverte, elle a avisé son père et ses collègues en grande pompe avant de déchanter quand son père lui dit que cela n’est que des cartes bonnes pour la poubelle, la vire et s’arrange pour qu’elle ne retrouve pas de travail dans le domaine de la cartographie. Aujourd’hui elle travaille pour une boite de reproduction de cartes anciennes et ne parle plus à son père.

Quel n’est donc pas sa surprise lorsque son père est retrouvé mort dans son bureau et que dans la sacoche où il garde ses cartes les plus rares se trouve une vielle carte routière de l’état de New York, du type qui s’acheter dans les stations service, carte qui, de plus, est celle qui à couté à Nell sa carrière. Lorsque, en plus, la bibliothèque de New York est cambriolée avec violence sans qu’aucunes cartes ne soient volée, que la mort de son père se révèle être sans doute un meurtre et que la vielle carte sans valeur semble être le dernier exemplaire en circulation, s’ouvre pour Nell une enquête cartographique qui la mènera sur les traces du passé de son père et de sa mère.

The Cartographers est un thriller cartographique, avec une bonne touche de magie, bien mené. J’ai apprécié sa lecture (et la réponse à la question : que y a-t-il aux endroits où une erreur cartographique se trouve sur les cartes ?) même si les ficelles du récit sont très grosses (je n’ai quasiment pas été surpris par les différentes révélations des mystères du roman).

La maison des jeux de Claire North

Trilogie de trois courts romans (novella) formant un tout cohérent, la trilogie de La maison des jeux de Claire North suit l’évolution de la mystérieuse et puissant maison des jeux. Institution ancienne, la maison apparait dans divers villes du monde (parfois même en même temps) et propose aux connaisseurs des jeux. Les meilleurs joueurs se voient invités dans la chambre haute de la maison où les enjeux sont plus grands (des années de vie, la maitrise d’une langue, la bonne santé, etc.) et où les partis peuvent façonner le destin d’une ville, d’une nation ou voir du monde.

Le premier tome de la trilogie, Le serpent, se déroule à Venise en 1610 et suit une jeune femme qui est invitée à joueur une partie dont l’enjeu est l’accès à la haute loge de la Maison et le jeu en lui même est d’arriver à faire élire un candidat dans le conseil de la ville. Le jeu semble équilibré sur le papier mais l’est-il vraiment ?

Le second tome, Le voleur, se déroule en Thaïlande en 1938. Remy Burke, un joueur avec une grande expérience, accepte, sous l’effet de l’alcool, de jouer sa mémoire dans une partie de cache-cache à l’échelle de la Thaïlande. La partie est dès le début très mal engagé et Remy joue très gros. La maison sensément impartiale semble vouloir le voir perdre…

Le dernier tome, Le maître, se déroule de nos jour et voit la Maison de jeux fermé pour une partie d’échec au niveau mondial dont l’enjeux est le contrôle de la Maison elle même. L’un des plus vieux joueurs défie la maîtresse de la Maison elle même pour la contrôle de cette dernière. S’en suit une partie qui va faire basculer le monde dans une période d’incertitude et révélé la raison d’être de la Maison et ses secrets.

La trilogie de La maison des jeux est non seulement bien écrit mais aussi passionnante à lire; à mon avis ces trois textes sont parmi les meilleurs publiés dans la collection une Heure-Lumière.

Le tournoi des preux de Jean-Philippe Jaworski

Avec Le tournoi des preux, premier tome d’une trilogie intitulée Le chevalier aux épines, Jean-Philippe Jaworski revient dans l’univers du Vieux Royaume en proposant un récit se déroulant après Gagner la guerre dans le royaume féodale de Léomance.

Le tournoi des preux est, comme dans tous les textes de Jaworski, écrit dans une langue riche qui fait la part belle aux termes médiévaux. Le récit suit, principalement et en alternant les points de vue, le chevalier Aedan de Vaumacel de retour après plusieurs années d’absence dans le duché de Bromael. Son absence lors du procès pour adultère de la duchesse Audéarde de Bromael a été remarqué (il était l’homme suspecté d’avoir fauté avec la duchesse) et a permis la répudiation de la duchesse et son enfermement. Le Duc s’est ensuite remarié avec la fille du nouveau dirigeant de la cité-état de Ciudadela.

Les fils légitimes de l’ancienne duchesse prépare leurs participations à un grand tournois dans le but de défendre l’honneur de leur mère et convainque le chevalier de Vaumacel de se joindre à eux. Ce dernier accepte mais poursuit sa traque de des personnes responsables de l’enlèvement d’enfants en Léomance.

Sur ces deux prémisses, Jaworski déploie un récit complexe mêlant plusieurs intrigues qui se croisent et baladent le lecteur en divers lieux du duché de Bromael. Le lecteur sent bien que les enjeux sont à tiroirs et que de nombreux chausse-trapes attendent les différents protagonistes de ces derniers.

Le tournoi des preux se conclut sur le tournois et un cliffhanger d’une redoutable efficacité. S’il serrait possible de trouver que le roman est peut-être un peu gros (plus de 500 pages), personnellement j’en redemande et suis très curieux de connaitre la suite.

City of Last Chances de Adrian Tchaikovsky

City of Last Chances est un roman de Fantasy, tirant un peu sur le Weird, de Adrian Tchaikovsky. L’action se déroule dans la cité de Ilmar qui a été conquis il y a quelques années par une puissance étrangère, les Palleseen. Ces derniers veulent rationaliser le monde et lutte activement contre les anciens dieux et les pratiques magiques locales (par exemple en confisquant les objets magiques qu’ils trouvent afin d’en extraire la magie pour la réutiliser dans du matériel standardisé).

La ville d’Ilmar se caractérise par la présence en son sein d’un bosquet qui sert, parfois, de passage vers d’autres mondes et d’un quartier maudit hanté par l’ancienne famille régnante de la ville. En Ilmar se trouve aussi un quartier d’immigrés mal considérés, une universités, des usines dont les machines sont actionnées par des démons, d’anciennes familles nobles tentant de retrouver de leur superbe et une pègre qui profite de tous ce qui se passe pour s’enrichir.

L’action de City of Last Chances débute par la mort d’un membre important de l’administration Palleseen et la perte d’une puissante amulette qu’il transportait. Cette amulette sera le MacGuffin du roman et le moteur de changement qui mèneront à un soulèvement populaire.

Le roman croise les points de vue de plusieurs personnages (un prêtre d’un dieu oublié, une étudiante, un mage en exil, un professeur d’université, etc.) dont les destins vont se croiser et se re-croiser pour forme la trame de l’histoire d’Ilmar.

City of Last Chances fait partie des très bons romans de Tchaikovsk, auteur prolifique dont les textes vont du très bon au « fait le job sans plus ».

Sylvana de Michel Pagel

Il y a quelques années en arrière j’ai acquis, chez les Moutons électriques, l’intégrale en édition « définitive » (c’est-à-dire retravaillée par l’auteur) de la Comédie Inhumaine de Michel Pagel. C’est un ensemble de romans et de nouvelles fantastiques qui sont liés plus ou moins fortement et dont j’avais déjà lus il y a de nombreuses années quelques tomes. J’ai enfin trouvé le temps de commencer cette intégrale avec le premier tome publié : Sylvana.

Sylvana est un court roman d’entrée dans l’âge adulte et de vampire. Écrit à la première personne, il mêle les témoignages de Michel et de Sylvana. Le roman narre comment ils se sont rencontrés, dans un petit village de Vandée au début de l’adolescence, comment leur amour est né et la fin tragique, alors jeunes adultes, de leur histoire.

Tragique car Sylvana est une vampire. Contrairement aux histoires, elle n’a pas de pouvoirs particuliers, ni d’aversions particulières, sinon qu’elle a besoin de sang humain pour survivre. Et ce sang dont elle a besoin, c’est le frère jumeaux de Michel qui va le lui donner. L’histoire va se conclure sur une fin tragique, comme le lecteur pouvait s’y attendre (il est d’ailleurs prévenu dès le début du roman).

Sylvana est un roman fantastique fort sympathique qui se laisse libre avec plaisir et qui fleure bon le terroir.

TysT de Luvan

Roman de fantasy bretonne / celtique de Luvan, Tyst se déroule dans un futur (?) proche après une troisième guerre mondiale qui a eu pour effet la fermeture des frontières. La narratrice du récit est une musicienne bretonne qui partage son temps entre notre monde (pas souvent) et le monde de la féerie. Elle se lance dans une quête qui va la mener à une menace pour tous le monde, à se (re)trouver et à, peut-être, changer jusqu’à l’histoire de notre monde…

TysT est un roman au abord un peu déconcertant dans sa narration entre onirisme et anticipation, mais avec la lecture vient la compréhension de cet univers construit en différentes strates entre rêve et éveille. Le tout forme finalement un roman féerique mélancolique et poétique d’une grande finesse.