Sacra II

Pouvant se lire de manière indépendante, mais représentant le second volet du recueil Sacra, et son pendant les nouvelles de ce recueil répondant aux nouvelles du premier tome, Sacra propose quasiment que des textes inédits (nouvelles ou novellas) où fortement remaniés et enrichis de Léa Silhol.
Bien qu’il serait réducteur de ne donner qu’un thème à chaque recueil, il est probablement possible de dire que si le premier tome était sous le signe de l’art, ce second volume est sous celui de l’héritage / la transmission; Héritage/transmission entre générations, mais aussi de l’histoire et du poids des décisions passées (et présentes).

Chaque texte de ce recueil tissent des liens avec le reste de l’œuvre de Silhol (comme toujours chez elle, mais c’est ici très très présent) et principalement avec celle du premier tome (mais, à l’exception peut-être d’un texte, tous les textes, je le répète, peuvent se lire pour eux même).

Difficile de parler des nouvelles du recueil sans soulever au moins un petit peu la trame, que ceux qui veulent garder une surprise totale sautent directement à la fin de cette chronique.

« Lumière Noire » est une une ré-édition à l’identique (il me semble) d’une nouvelle que je connaissais, elle suit une jeune femme atteinte de syphilis, à une époque où la maladie est incurable, et son petit-ami qui mettent la main sur une lampe Oscuro de Isenne et découvre un autre monde dans les ombres. Une nouvelle qui ouvre en douceur aux mystères de ce recueil.

« Sfrixàda, l’Empreinte, dans la cendre » est un dialogue, en la cité d’Isenne, entre une visiteuse prestigieuse et un artisan qui narre une histoire d’amour et la chute d’un Royaume. Une belle écriture pour une nouvelle faisant le lien entre une du tome précédant et une histoire de tailleur présent dans Les Conte de la Tisseuse.

«  »D’une étoile à l’autre » est probablement le texte qui pourrait sembler le plus obscure pour les lecteurs peu habitué à la trame « silholienne ». C’est une version longue de la nouvelle « L’étoile au matin » qui se déroule, de nos jours, à Istanbul. Elle met en scène Lucifer lui même qui, suite à une visite, décide de se préparer à choisir un camp dans un conflit ancien. La novella voit se succéder une brochette d’immortelles et de factions occultes (Fays, Djinns, Nephilims, etc.) qui tissent entre eux la quasi totalité des textes de La Trame et laisse présager d’un conflit imminent. Un très beau texte qui parlera sans doute le plus aux familiers de l’auteure et surtout de son œuvre.

« Béni soit l’Exil », version longue et d’un autre point de vue de « La Faveur de la Nuit », narre la grandeur, la chute et l’exil (se terminant à Isenne) d’une nation qui a cherché, obtenu et perdu, les faveurs d’un prince sombre de féerie. Un texte très bien maitrisé et agréable à lire.

« Le Maître de Kodo », une longue novella (probablement mon texte préféré du recueil) se déroulant au Japon et qui voit un groupe de Fay (avant la découverte de Frontière) se rendre au près d’une ancienne famille  du pays afin de sauver sa plus jeune membre. Celle ci, Fay, est perdu dans le monde virtuel (le GRID) à la recherche de son âme sœur. Il est question ici de malédiction famille, de flocons, de tatouages, de secrets et de découvertes. Je ne peux qu’adhérer, surtout quand se rencontre la trame de Frontière avec la nouvelle qui m’avait le plus marqué dans Les Conte de la Tisseuse : « la loi du flocon ». J’espère pouvoir en lire d’avantage sur la Fay de la famille dans le futur.

« Emblemata » est une courte nouvelle qui narre la rencontre entre un voyageur et un immortelle en 1931 en Orient pour une longue discussion sur les religions et le passage du temps. Si la nouvelle contient d’intéressantes réflexions, elle est pour moi un cran au dessous du reste.

« The Passenger » clôt le recueil et fait écho à la première nouvelle de Sacra I en narrant, à New York alors qu’une ambassade de Frontière est reçu à l’ONU, les retrouvailles entre un traducteur et « son » auteure disparue il y a plus de 20 ans et revenu changée. Une nouvelle qui montre qu’être différent est avant tous un choix et qu’il n’est jamais trop tard ?

Finalement Sacra II est de très très bonne facture et forme un tous avec Sacra I. A noter que l’ordre dans lequel les textes sont présentés n’est pas dû au hasard et forme un voyage très bien pensé.