La saveur des savoirs

Jean-Pierre Astolfi, avec son livre La saveur des savoirs, propose une réflexion de fond sur les pratiques enseignantes afin de « professionnaliser » d’avantage la profession et redonner la véritable « saveur » des savoirs à la fois aux enseignants mais également aux élèves.

Pour ce faire, il préconise l’utilisation des réflexions les plus récentes en pédagogique et sciences de l’éducation afin afin de redonner sens à l’enseignement, le constructivisme fait partie de ce qu’il faudrait faire. Mais au delà de ce constat, Astolfi construit sa réflexion autours du vocabulaire et des pratiques courantes dans l’enseignement (français). Chaque chapitre de La saveur des savoirs est ainsi consacrée à un aspect de sa réflexion.

Le premier chapitre est ainsi consacré à rappeler l’importance des constructions conceptuelles de chaque discipline dans la formation d’une vision du réel particulière. Astolfi rappelle que la nuance entre un mot du langage courant et son utilisation en tant que concept est fondamentale dans la compréhension d’une discipline. Il milite donc pour l’enseignement des particularité disciplinaire afin de proposer un large éventail de vision du réel aux élèves. Le second chapitre est une déconstruction/reconstruction des principaux concepts de l’enseignement souvent utilisé à tord et à travers. Le but est de doter les enseignant de concepts forts et partagés qui permettent une meilleurs professionnalisation de l’enseignement.

Les deux chapitres suivant sont une discussion du constructivisme dans l’enseignement aujourd’hui et de la manière dont ce dernier permet de redonner de « la saveur aux savoirs » et de replacer le processus d’enseignement dans le temps long. Les trois concepts de « champ-conceptuels », « d’objectifs-obstacles » et de « problèmes et problématisation » sont centraux pour réaliser cet objectifs.

L’ouvrage se conclut par plusieurs chapitres traitant de divers autres aspects de l’enseignement et qui sont des reprises de textes de conférences. Astolfi aborde ainsi l’apprentissage comme spécificité de l’espèce humaine, les liens entre oral et écrit, le savoir de l’information comme discipline, les contrats pédagogiques, sociaux et didactiques, et l’enseignement aux adultes illettrés.

La lecture de La saveur des savoirs me laisse une impression mitigée. D’un côté j’ai trouvé la réflexion brillante et enrichissante, particulièrement celle sur les spécificités disciplinaires et sur la déconstruction/reconstruction des concepts de l’enseignement. A ce titre j’ai l’impression d’être maintenant mieux outillés pour penser ma pratique de l’enseignement. Mais d’un autre côté, cet ouvrage souffre de deux défauts. Le premier, plus marginale, et la faiblesse de ses derniers chapitres , repris de divers conférences, qui me semble un peu parachuté et sans grandes unités de réflexion avec le début de l’ouvrage. Le deuxième, plus important, et qui, j’ai l’impression, est souvent présent dans les réflexions sur le (socio-)constructivisme que j’ai pu côtoyer, est l’absence de propositions pratiques et concrètes pour réaliser les objectifs ambitieux proposés. En effet, il est demandé aux enseignants de redonner la véritable « saveur » de ce qu’ils enseignent, de favoriser l’apprentissage et l’intériorisation des contenus disciplinaires par les élèves, le tout en stimulant leur intérêt (indispensable au point précédant) et en évitant les leçons dites frontales car ces dernières favorisent la passivité des élèves; mais nulles conseils ne sont donnés aux enseignants sur la manière concrète d’atteindre ses objectifs.

Un réflexion enrichissante donc qui me laisse somme tout bien seul au moment de concevoir et exécuter des séquences d’enseignement en classe qui devraient sortir des anciens schémas d’enseignement par trop scolaire.