Everything inside : Stories de Edwige Danticat

Nouveau recueil de nouvelles de Edwige Danticat, Everything inside : Stories propose huit nouvelles se déroulant entre Haïti et États-Unis et qui mettent en scène des Haïtiens vivants ou ayant vécu aux États-Unis.

Le point commun entre les différentes nouvelles du recueil est la mort qui rode, que cela soit sous la forme d’un enlèvement d’une femme, d’une jeune fille malade du Sida, d’un ouvrier tombant d’un échafaudage, etc.

Les nouvelles mettent aussi au centre les liens compliqués entre les deux cultures dans lesquelles vivent les protagonistes : premier monde et tiers monde, chez soi et chez l’autre, ceux qui sont partis, ceux qui sont restés et ceux qui sont revenus, etc.

L’écriture de Danticat fait mouche et son talent pour mettre en avant la singularité et l’universalité de l’expérience des migrants font de ce recueil une réussite. A titre personnelle les deux nouvelles clôturant le recueil, tirant d’avantage vers l’Imaginaire et qui mettent en scène un voyage dans une île des Caraïbes typique pour la première et la chute d’un ouvrier migrant d’un échafaudage de chantier, sont mes préférées.

Claire of the Sea Light

Dernier roman en date d’Edwige Danticat, Claire of the Sea Light est un roman qui se déroule en Haïti et qui suit les destins de plusieurs personnes, liées entre elle, dans la ville haïtienne de Ville Rose.
Le roman débute et se termine avec le destin de Claire Limyè Lanmè, fille d’un pécheur et dont la mère est morte en couche. Son père tente chaque année, le jour de son anniversaire, de la confier au soin de la propriétaire d’un magasin de tissus, veuve, dont la fille est morte le jour de la naissance de Claire et qui l’a nourris durant ses premiers jours.
A partir de cette première trame, le roman suit ensuite de proche en proche le destin de plusieurs personnages de la ville, dans le présent du roman et dans le passé : la propriétaire d’un magasin de tissus, un jeune des quartiers pauvres de la ville, le fils d’un notable de la ville (directeur et propriétaire de l’école que fréquente Claire), l’amante du père et présentatrice radio, la mère de l’enfant du fils du notable,…
Claire of the Sea Light tisse ainsi le portrait de Ville Rose au travers des connections et de liens qui lient plusieurs des ses habitants. Un roman fascinant, même si je l’ai trouvé un cran au dessous des ses autres écrits.

Brother, I’m dying

Comme certain sans sont peut-être rendu compte, je suis un fan inconditionnel des écrits d’Edwige Danticat (écrivaine américaine d’origine haïtienne). C’est donc avec une curiosité certaine que je me suis lancé dans la lecture de sa dernière production (paru il y a peu en poche, mais il y a déjà une année en grand format). Et après sa lecture, je dois dire que c’est son livre qui m’a le plus touché et qui m’a laissé en pleure une fois la dernière page tournée.

L’écriture puissant de Danticat n’est pas étrangère à cette montée de larme, mais c’est sans aucun doute le caractère autobiographique, et donc « réel », de Brother, I’m dying qui en est avant tous responsable. Danticat y narre la vie de ses deux pères, le biologique immigrés aux États-Unis dans les années 70 et son oncle avec qui elle a vécu 8 ans en Haïti avant de rejoindre son père biologique. Le point de départ de ce livre est le jour de 2004 où elle a appris sa grossesse et la maladie qui condamnait son père à une mort certaine. A partir de là, Danticate revient sur les moments importants de sa vie, mais surtout c’est la vie de ces deux hommes qu’elle narre, jusqu’à leur issue tragique. Mais c’est aussi à une plongée vertigineuse dans l’histoire tumultueuse et tragique d’Haïti durant les cinquante dernières années que nous invite Brother, I’m dying. Et c’est au travers de l’histoire particulière de sa famille, histoire pourtant semblable à tant d’autres, que cette plongée s’effectue.

Au final donc un grand et beau livre qui vous prends aux tripes et que ne peut laisser indifférent.

Breath, eyes, memory

Breath, eyes, memory est le premier roman qu’a écrit Edwidge Danticat, une auteur que j’apprécie particulièrement. Écrit à la première personne, ce roman narre l’histoire de Sophie, une haïtienne élevée à Haïti par sa tante qui au début de l’adolescence part rejoindre sa mère émigrée à New York. Là, après plusieurs années, elle tombe amoureuse d’un homme plus agé et quitte la maison familiale pour se marier avec lui. Plus tard encore elle entreprendra un voyage vers son passé et pour lutter contre les démons de ses origines et donner à se fille nouvelle née une enfance plus sereine que la sienne.

Le roman est écris avec finesse et aborde la douloureuse question du viol, dont est issue Sophie, de la transmission entre génération et de l’expérience migratoire. Malgré la violence du sujet, Breath, eyes, memory ne m’a pas fait, comme les autres livres de Danticat, l’effet d’un coup de point mais plutôt celui d’un long chant triste et mélancolique que l’on entendrais un jour de brume. Un roman magnifique portant une histoire simple en apparence mais complexe par sa profondeur.

The farming of bones

Le quatrième de couverture de the farming of bones débute par ces mots d’un critique du Time : « A powerful, haunting novel… every chapter cuts deep, and you feel it. » Ce commentaire me semble particulièrement adéquat tant l’écriture de Danticat tombe juste et vous prend aux tripes et au cœur.

The farming of bones, son premier roman, narre l’histoire de Amabelle, une jeune haïtienne au service d’une famille dominicaine dans la petite bourgade de Alegria. La première moitié du roman narre sa vie quotidienne entre son service domestique et ses amours avec un jeune coupeur de cane de la ferme voisine.

Dès la seconde moitié du roman, l’histoire bascule dans l’horreur lorsque débute le massacre des Haïtiens ordonné par le dictateur Trujillo. L’on suit ainsi la fuite d’Amabelle pour rejoindre la frontière et la sécurité relative de son pays.

Sur ces bases historiques, le roman s’étend de 1937 à 1966, Danticat continue sa recherche de la tragique histoire haïtienne. Doté d’une écriture coupante et précise, ce roman, comme les autres écrits de l’auteure, vous prend et vous lessive. Une magnifique lecture qui ne peut laisser indifférent.

The Dew Breaker

Après avoir lu Krik? Krak!, je me suis lancé dans la lecture d’un autre recueil de nouvelles d’Edwidge Danticat, nouvelles qui sont égallement liées entre elles (même d’avantage que dans Krik? Krak!). Ce lien est si fort que pour une fois je ne passerais pas chaque nouvelle en revue.

Les histoires qui se croisent dans the dew breaker confronte un Tonton Macoute « rangé » à des victimes de la violence de la dictature des Duvalier. La plupart des nouvelles se déroulent aux USA et posent des questions telles que la vie après la violence, le poids du passé pour la génération suivante et la capacité de l’homme à l’oubli, au pardon et à la vengeance.

Ces nouvelles qui se répondent, et au final forment un cercle ou la fin du recueil croise son début, sont tous simplement superbes. Bien écrites, elles vous prennent à la gorge, aux tripes et au cœur. The dew breaker vous laisse, au final, lessivé et sans voix. Une lecture forte et sublime qui laisse des traces.

Krik? Krak!

« Krik? » demande le publique, « Krak! » répond le conteur avant de commencer son histoire. C’est par ces deux mots que commence la narration d’une histoire à Haïti, et c’est par ces deux mots que Edwidge Danticat a décidé de nommer son recueil de nouvelles. Des nouvelles qui nous parles de Haïti et des femmes. L’écriture puissante de Danticat et les thèmes qu’elle aborde font que chaque nouvelle est un coup de point que l’on reçoit. Un recueil fort donc, mais d’une beauté sublime et d’un écriture limpide et évocatrice.

« Children of the sea » narre le destin tragique d’un boat people perdu en mer et de sa petite-amie restée à Port-au-Prince, alors qu’une sanglante révolution vient d’avoir lieu.

« Nineteen Thirty-Seven » raconte les derniers jours d’une femme emprisonnée, le destin de sa fille, et le rituel secret qui les lient.

« A wall of fire rising » suit la vie familiale d’une famille pauvre, de l’amour d’une mère pour son fils jusqu’au rêve impossible d’un père sans estime de soi.

« Night Women » : la vie d’une mère et prostituée dans sa « cabane » à la fois lieu de vie avec son fils le jour et lieu de travail la nuit.

« Between the pool and the gardenias » : une femme, employée domestique à Port-au-Prince, trouve un nourrisson abandonné, elle le prend, il meurt, son amour pour lui aura de tragique conséquence pour elle.

« The missing peace » : une femme à la recherche de sa mère, un village et son charnier, une adolescente qui devient femme. Une histoire de maturité et de tragédie.

« Seeing things simply » : une adolescente pose nu pour une peintre française. Une plongée dans les mentalités haïtiennes et dans l’estime de soi d’une femme en devenir.

« New York day women » : une Haïtienne à New York voit sa mère dans la rue, elle la suit et découvrira un pan de la vie de sa mère qu’elle n’aurait jamais soupçonné.

« Caroline’s wedding » : une longue nouvelle qui narre les préparations du mariage d’une américaine d’origine haïtienne, ses relations avec sa mère et sa sœur, née en Haïti. Une nouvelle sur la perte d’une fille, sur la transmission de l’identité et, quelque part, sur l’exil et la nature humaine.

« Epilogue: Women like us » : un épilogue en forme de plaidoyer pour l’écriture et la mémoire ancestrale.