Fo/Vea

Ceux qui me connaissent savent que je suis un grand fan de Léa Silhol, j’aime beaucoup la grande trame qu’elle tisse dans ses romans et ses nombreuses nouvelles. Fo/Vea ajoute un nombre substantiel de fils à la trame; fils qui sont aux limites des changements de couleurs de la trame.

A titre personnelle j’ai bien aimé les nouvelles de ce recueil. Elles font des liens entre divers pans de la trame silholéenne, et mettent en lumière des liens nouveaux. Je ne peux néanmoins m’empêcher de penser que la plupart des nouvelles (environs la moitié) sont en partie incompréhensible pour ceux qui ne connaisse pas un minimum l’œuvre de Léa Silhol.

La forme du recueil est également intéressante : il est en effet émaillé de nombreuses photos et puzzles divers. D’après l’auteur, il y a la matière à décoder certain pan de son œuvre. Détestant les codes dont je n’ai pas les clefs, j’ai tactiquement sauté cela afin de ne lire que les nouvelles. Une erreur peut-être, mais ma paix de l’esprit passe par cela.

Notre Dame aux Ecailles

Ce second recueil de nouvelles de Mélanie Fazi est à même de ravir tout amateur de fantastique. Avec une plume maniant les mots brillamment, Mélanie Fazi donne, avec Notre Dame aux Écailles, treize nouvelles, dont la plupart sont inédites, aux accents fantastiques plus ou moins marqués.

Elle nous mène pèle mêle de la France aux États-Unis en passant par la Sérénissime. Elle brosse un portrait de personnage plus ou moins torturés qui doivent faire fasse à un élément fantastique toujours amené avec tact.

Il ressort de ce recueil un sentiment de maitrise et un sens de la faille qui, à mon avis, place Mélanie Fazi au niveau de l’autre grand auteur fantastique français : Michel Pagel. Un recueil à lire absolument.

In the country of last things

Premier Paul Auster que je lis, In the coutry of last things est une très bonne surprise. Un roman noir, situé à la limite de l’anticipation, où l’on suit, à travers une lettre à son frère, les péripéties d’Anna Blume. Cette jeune fille est partie à la « City », une ville dont on ne connait pas le nom, afin d’y retrouver son frère journaliste disparu.

Le récit qui suit est surréaliste : dans la « City » la vie des hommes est broyée par le système. Des hordes de sans-abris vivent de la récupération, l’énergie est produite en réutilisant les corps des morts, un gouvernement totalitaire isole la ville de l’étranger par des murs de protection, etc. Tout dans la ville est à la fois absurde et familier ; en effet c’est notre système capitaliste poussé à son maximum, c’est l’effet destructurant de notre mode de vie à son paroxysme. Ce qui donne au final un roman étrange, avec une ambiance noire bien particulière qui me fait penser à celle du film Dark City, sans les éléments fantastiques (quoique…).

Une excellente lecture, bien écrite et vite lue, et qui, en tous ce fut le cas pour moi, ne laisse pas tout à fait indemne.

La fraternité du Panca I : Frère Ewen

Ewen vit une vie heureuse avec sa femme enceinte et sa fille dans les montagnes de la planète où il a décidé de s’installer. Mais voila Ewen est un frère du Panca, une fraternité mythique reparti dans l’univers dont le but est la sauvegarde du genre humain. Un jour, à travers un implant cérébrale, Ewen est appelé, il doit quitter son monde pour en rejoindre un autre, distant de 80 ans de voyage, afin de donner son implant à un autre frère pour constituer le premier maillon de la mythique chaine quinte. Car l’humanité est en danger.

Au même moment, Olem, un jeune garçon quitte avec sa famille son village pour un voyage qui doit le mener dans le même système qu’Ewen. Son chemin semé d’embuches lui fera rencontrer l’amour, la belle Sayi, et frère Ewen.

Ce space-opèra de Bordage qui alterne deux focus de narration (Ewen et Olem) n’est pas en soi original; en effet Bordage ne fait que raconter encore et toujours la même histoire : une menace universelle sur la race humaine, un héro improbable qui doit se mettre en quête pour la contrer, une vision humaniste de l’expansion de la race humaine. Et pourtant, Bordage est un tel conteur, propose une vision si chatoyante de l’univers, que son roman se lit avec délice et plaisir. C’est d’ailleurs le premier d’un cycle qui en contiendra 5.

Faery City

Faery City n’est pas vraiment un roman comme les autres, en effet Mathieu Gaborit, l’auteur, c’est fait accompagné par Amandine Labarre aux illustrations. Au final, cette ouvrage est donc un court roman, presque une nouvelle, illustré.

On y suit les aventures de Brune, une jeune fille de 19 ans qui, suite au décès de sa grand-mère, part à la recherche de ses origines. Elle découvrira un Paris parallèle, refuge des êtres merveilleux depuis la Saint Bartélhémy où ceux-ci ont été sauvagement massacré. Elle devra également découvrir la signification d’un mystérieux tarot afin de prendre la place qui lui est due dans les Arcanes de ce monde féérique.

Cette histoire d’Urban Fantasy vaut surtout pour ses belles illustrations. L’histoire intéressante ressemble plus à un prologue ou une introduction à une histoire plus vaste. Personnellement je en peux qu’espérer qu’elle cette dernière sera racontée.

The Chosen Place, the Timeless People

Lorsque j’ai commencé ma lecture de ce roman de Paule Marshall, je dois bien avoué qu’il m’est tombé des mains et que j’ai du m’y reprendre à trois fois avant de pouvoir dépasser la quatrième page. Ma fois, bien m’en a pris car ce roman est un véritable petit bijou.

Le roman suit la trajectoire de plusieurs personnages : un anthropologue juif américain blanc, sensible et ouvert d’esprit; sa femme une bourgeoise américaine blanche; un jeune anthropologue américain; un jeune noir des Caraïbes et une femme mure, également des Caraïbes, au lourd passé. Ces personnages se retrouve dans la région pauvre de Bourne Islande : Bournhills. Cette région et cette île imaginaire des Caraïbes servent de creuset pour une réflexion très fine et très intelligente sur le colonialisme, le néo-colonialisme, le sous-développement, l’aide au développement, etc.

Il est difficile de retracer l’intrigue de ce roman tant il est riche. L’écriture est riche et complexe et l’auteur alterne avec bonheur les points de vue narratif selon le personnage dont elle parle. Une lecture au final donc peut-être un peu difficile mais qui vaut largement la peine tant ce roman est riche et profond.

Northern Lights

En prévision de l’adaptation cinématographique, prévue en décembre, de Northern Lights (The Golden Compass au ciné), premier volet de la trilogie His Dark Materials, j’ai décidé de le lire avant de voir le film.

L’histoire, tous d’abord, est une quête « classique ». Une jeune fille, aux origines peu claire, élevée à Oxford, part pour un voyage afin de sauver un de ses amis enlevé par une mystérieuse organisation. En chemin, elle rencontre des alliés et des ennemis, et lève peu à peu le voile sur le mystère de sa naissance et les butes de l’organisation. Au final, une histoire connue, permettant l’identification des adolescents à l’héroïne de l’histoire. L’originalité n’est pas là.

L’écriture n’est pas originale non plus, mais est d’excellente qualité, Northern Lights est agréable à lire; rien à redire de ce côté là.

L’originalité se niche dans l’univers : un XIXe siècle parallèle, ou une église fragmentée est toute puissante. Chaque humain est lié à un daemon, un fragment de son âme qui prend une forme animale et accompagne toute sa vie « son humain », lui donnant un compagnon intelligent. Un monde où se trouve également un peuple d’ours blanc intelligent, véritable machine de guerre sur pattes. Un monde surtout où les scientifiques et religieux s’interrogent sur l’origine et les propriétés du « Dust ». Et c’est là toute l’originalité de ce premier livre, les autres se déroulent en partie sur d’autres monde : un Univers original, décalé mais pas trop. C’est également une critique voilée de l’extrémisme religieux et du fanatisme.

Au final, peut-être pas un chef d’œuvre, mais définitivement un livre à part dans l’abondant production actuelle.

Les Noëls électriques

Un recueil de nouvelles de Noël destiné aux adultes, voila un livre qui m’a intrigué. C’est donc avec impatience que j’ai ouvert ce livre et lue les différentes nouvelles qui ce cachent sous une magnifique jaquette dorée.

Comme tous recueil de nouvelles, Les Noëls électriques cache des perles et des nouvelles que je me serais passé de lire. Mais c’est avec plaisir que je reconnais qu’il y a ici plus de perles que nouvelles à oublier.

« Adaptation » narre l’histoire d’un libraire, ancien comptable, père d’une petite fille, et divorcé qui, la veille de Noëls, fait la connaissance des fantômes de Noël. Ces derniers ne sont plus que l’ombre d’eux même, mais ils seront néanmoins capable de lui apporter un peu de joie.

« Un contrôle de Noël » est un nouvelle jouissive sur une famille contrôlée par la brigade de respect des traditions de Noël. Une nouvelle déjantée mais c’est tellement bon !

« Noir comme neige » est une nouvelle noir sur le remord, le passé et la mort. Le tout dans un hôpital durant la nuit de Noël.

« Un léger moment d’absence » voit un lutin du père Noël consulté un psychiatre pour des problèmes d’identités. Une excellente nouvelle écrite au vitriol.

« L’arbre et les corneilles » nous parle de transmission des valeurs à une nouvelle génération. Une femme enceinte se soumet à une tradition familiale, et les corneilles lui apportent des fragments de son passé.

« Tchingumabob » fait partie des quelques nouvelles que je n’ai absolument pas aimées. Une histoire de voyage virtuel avec des créatures puissantes sur fond d’histoire d’amours. Vraiment mauvais !

« Evasion à Gui 5 » ou lorsque un ancien père Noël ayant péter un plomb s’échappe de l’asile et menace de tuer tous les enfants pas sage du monde. Les elfes auront fort à faire pour sauver Noël !!! Une autre nouvelle écrite au vitriol.

« Du chauffage au sol considéré comme arme d’attaque » est une enquête policière s’inspirant de Sherlock Holmes. Saint Nicolas mène l’enquète sur fond de guerre avec les pères Noël.

« Dans l’antre du docteur Coppelius » ou quand un draguer impénitent doit surveiller un enfant d’un magasin géant de jouets. J’aurais pu dire, ou comment faire une nouvelle d’horreur sur Noël.

« La mort des joujoux » la naissance et la déchéance du père Noël sur un ton humoristique. Pas mal, mais un cran au dessous du reste du recueil.

« Les harpes d’or », la guerre des tranchés de la première guerre mondial durant la nuit de Noël, poignant et dur.

« Noël dans la cathédrale de Reims » est une nouvelle composite formée de témoignage sur la fin de Noël, lâchés par l’ensemble de la communauté internationale et par l’économie.

« Soudain tout à changé » est une sympathique nouvelle sur la mort, les souhaits qu’on a lors de son vivant et le père Noël.

« Bienvenue à C*** Island » une nouvelle étrange, faisant pensé à la série « le prisonnier », se déroulant sur Christmas Island. Pas mal, mais également un cran en dessous.

« Le père Noël à des principes », le père Noël a été assassiné pour une banal histoire d’adultère. Une nouvelle policière fort sympathique.

« Le poney » est une autre nouvelle d’horreur (diffuse) sur Noël. Ou comment réagir quant des cadeaux assouvissant les souhaits profond de ceux qui les reçoivent comment à apparaitre.

« l’étoile du nord » est une nouvelle d’anticipation sur l’état de notre monde d’ici quelques décennies vu par les yeux d’un enfant. Touchant !

« Mystère et boules de Noël » une nouvelle sympathique, mais également un cran au dessous, sur l’amitié entre un chat et un lutin.

« Winter Wonderland Inc. » clôt le recueil sur une nouvelle qui dépeint au vitriol la multinationale tentaculaire de Noël au travers du récit d’un de ses employés (la personne chargée d’analyser les lettres au père Noël). Un récit fort sympathique.

Les Noëls électriques se termine par un texte d’analyse survolant les différentes traditions de Noël dans le monde.

Au final, je ne peux que conseiller ce superbe recueil qui ferrait, je le pense, un très jolie cadeau de Noël.

Comme un roman

Hier, alors que je parlais de ce bouquin, j’ai été pris d’une envie soudaine de le relire. Aussitôt pensé, aussitôt fait ! Et Comme un roman est toujours aussi bon que dans mes souvenirs.

Pennac offre ici à la fois une réflexion sur la lecture et sur ce qu’est « être lecteur », mais également sur la pédagogie et l’école qui, parfois (souvent ?), tue le plaisir de la lecture. Tous cela d’une écriture fluide et agréable. Même si je ne suis pas convaincu à 100% par certaines de ces remarques (notamment sur celle pour redonner le gout à la lecture), ce roman (essaie ?) touche juste. Il n’a, de plus, presque pas vieilli : et si le langage des « jeunes » à changer, il exprime, dans le fond, toujours la même chose : la révolte adolescente et le rejet de ce qui est imposé.

Je ne résiste pas ici de reproduite « Les droits imprescriptibles du lecteur » :

1. Le droit de ne pas lire.
2. Le droit de sauter des pages.
3. Le droit de ne pas finir un livre.
4. Le droit de relire.
5. Le droit de lire n’importe quoi.
6. Le droit au bovarysme (maladie textuellement transmissible).
7. Le droit de lire n’importe où.
8. Le droit de grappiller.
9. Le droit de lire à haute voix.
10. Le droit de nous taire.

Musiques de la Frontière

J’adore les romans de Léa Silhol, et j’aime encore plus ses nouvelles. Son écriture est à la fois gracieuse, complexe, évocatrice et me capture à chaque lecture. La semaine dernière j’ai donc eu envie de relire le recueil Musiques de la Frontière.

Au fils des différentes nouvelles de ce recueil émerge l’histoire du peuple Fay. Ces enfants de l’homme, nés à notre époque, enfermé car trop sublime, trop différent, dévoile ici leur histoire : la conquête de leur ville, Frontière, ville hors du temps et de l’espace, la terre promise des Fay que l’on doit trouver avant de pouvoir y entrer; des histoires tragiques, de fureurs, de glamours et de beautés, des histoires d’apaisement, d’amour et de paix retrouvée enfin. Au final une histoire qui se raconte dans ce superbe recueil, devenus, hélas, difficile à trouver.

L’écriture de Léa Silhol puissante et belle convient parfaitement à ces histoires de Fantasy urbaine. Un must pour tous les fan d’imaginaire et de littérature française.